[ANNECY 2020] Ginger’s Tale + Jungle Beat + Nahuel And The Magic Book

Sur les cinq long-métrages de la compétition disponibles dans leur intégralité, trois étaient des œuvres se destinant au plus jeune public. Rien de critiquable en soi mais on se demandait si elles sauraient nous parler.

Dans notre présentation de cette édition d’Annecy, nous espérions que Ginger’s Tale saurait nous surprendre derrière son pitch on ne peut plus classique. Pendant les premières secondes du film, on se prend à le croire. Il faut bien accorder au film de Konstantin Scherkin de soigner sa direction artistique. Tout en se conformant à une logique de spectacle accessible de 7 à 77 ans, le film manifeste des efforts de stylisation appréciables. Ceux-ci rendent pratiquement excusables une animation assez faiblarde. Après tout, cela est logique avec le cœur du film nous rappelant que l’argent ne fait pas le bonheur. Malheureusement, cela nous amène également aux autres aspects moins reluisants du long-métrage. Car les premières minutes posent également un rythme hyperactif dont le film de se départira pas ensuite. Le récit file à tout allure sur ses 90 minutes, ne s’accordant aucune respiration. Cela donne l’impression d’une intrigue allant dans tous les sens sans grande logique et balançant ses idées avec moins de souci de cohérence. Cela apparaît comme un cache-misère à une histoire manquant cruellement d’intérêt. Car ici, le conte ne brode guère autour de ses atours moraux. Il nous faut donc tolérer avec de grandes difficultés une intrigue nous disant ouvertement que l’avidité est une mauvaise chose et la bonté une bonne chose. Pourtant, on pourrait bien trouver un semblant de charme à une héroïne dont l’altruisme va de pair avec la maladresse et un minimum de sens dans un artiste qui, face au manque de reconnaissance, sacrifie son art pour accepter l’argent facile. Mais l’écriture n’en fera pas grand-chose, toute entière dévolue au divertissant oubliable. Au contraire d’élever un pitch classique, c’est bien le conformisme le plus oubliable qui l’emporte.

Jungle Beat : The Movie arrive également à nous faire croire pendant ses premières minutes que l’on va passer un pas trop mauvais moment. Sans être innovante, la réalisation fait preuve d’un certain dynamisme. Ses graphismes colorés, sa direction artistique classique mais plutôt agréable, l’efficacité de son montage… Il y a quelque chose de presque grisant dans cette introduction muette. Sauf que muet, le film ne va pas le rester longtemps. Au contraire, les animaux découvrent la parole et ne vont plus se priver pour l’utiliser. Voir en 2020 une comédie reposant longuement sur le fait que les animaux parlants c’est bizarre, ça ne constitue pas une expérience agréable. Malheureusement, cela donne la mesure pour tout ce qui va suivre. A tous points de vue, Jungle Beat : The Movie ne se montre guère intéressant dans son écriture. Avec sa rencontre d’un extraterrestre et des animaux de la jungle, il déroule un énième programme sur le pouvoir de l’amitié. Pas un cliché ne manque à l’appel et le résultat serait tout à fait infâme si Brent Dawes ne croyait pas étrangement dans le peu qu’il veut raconter. Car le réalisateur ne lâche rien dans le rythme, toujours désireux d’assurer l’efficacité d’un spectacle si pauvre dans son fonds. Accordons-lui que ses efforts sont relativement payants et évitent de voir Jungle Beat : The Movie comme une totale perte de temps.

Nahuel And The Magic Book porte aussi la marque d’un réalisateur qui ne rechigne pas à la tâche. Pourtant, Dieu sait que le scénario ne nous épargne là encore aucune convention du voyage initiatique : le froid entre le père et le fils en raison de la mort de la mère, le héros manquant de confiance en soi qui se fait martyriser, l’objet magique mal utilisé, le parcours pour réparer son erreur et grandir… Toutes les cases du petit manuel sont cochées. Néanmoins, le réalisateur German Acuna arrive à dégager une vraie tendresse dans sa première partie. Il n’affiche aucune prétention, ayant parfaitement conscience du manque d’originalité de l’histoire et se refusant à masquer celle-ci par de l’hystérie. Au contraire, le film prend le temps de s’installer, laisse prendre la douceur de son visuel et le charme de son ambiance côtière. Malheureusement, la qualité devient un défaut lorsqu’il faut aborder la partie aventure du récit. A défaut de trouver des épreuves excitantes ou surprenantes, le long-métrage nous laisse constater la mollesse de l’animation et le manque de souffle du cheminement. Cela se renforce par la caractérisation de son héros. Manquant cruellement de nuance, il se montre trop lisse pour présenter des questionnements accrocheurs. Au final, on se retrouve avec un spectacle ni raté ni très réussi.

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