REALISATION : Stephen J. Anderson, Don Hall
PRODUCTION : Walt Disney Pictures, Walt Disney Animation Studios
AVEC : Jim Cummings, Tom Kenny, Craig Ferguson, John Cleese…
SCENARIO : Burny Mattinson
MONTAGE : Lisa Linder Silver
BANDE ORIGINALE : Henry Jackman
ORIGINE : Etats-Unis
GENRE : Animation
TITRE ORIGINAL : Winnie The Pooh
DATE DE SORTIE : 13 avril 2011
DUREE : 1h03
BANDE-ANNONCE
Synopsis : Un nouveau jour se lève dans la Forêt des rêves bleus. Comme à l’habitude, Winnie l’ourson se réveille avec une faim de loup et s’aperçoit qu’il n’a plus de miel. Il part en chercher, mais cela va s’avérer plus compliqué que prévu. Il commence par être interrompu en cours de route par un concours pour trouver une nouvelle queue à Bourriquet. Poursuivant son chemin, Winnie trouve ensuite un mot de Jean-Christophe où il est écrit : « Je suis sorti. Des choses à faire. Je reviens bientôt ». Mais Maître Hibou interprète mal le message et raconte à tous que le jeune garçon a été enlevé par une créature mystérieuse. Winnie et ses amis se lancent alors dans une folle équipée pour le sortir des griffes d’un ravisseur imaginaire. Pour le petit ours qui ne rêvait que d’un peu de miel, cette journée va se révéler pleine de surprises.
Depuis maintenant quatre ans, le studio d’animation Disney est entrain de remonter doucement mais surement la pente. A défaut de vivre un nouvel âge d’or, la boîte de tonton Walt renoue au moins avec une certaine norme de qualité grâce à l’impulsion de John Lasseter. Ainsi ont vu le jour des œuvres aussi sympathiques que Volt et Raiponce, nous vengeant allégrement des fosses nauséabondes dans lesquelles on s’est fourré avec Chicken Little ou encore La Ferme se rebelle. Pourtant, la surprise est de mise avec leur dernière production. Alors que le studio retrouve une certaine estime de son propre travail, voilà qu’il a été décidé de projeter sur les écrans une nouvelle aventure de Winnie l’Ourson. Choisir de sortir de nos jours une adaptation de l’ouvrage de A.A Milne pourrait paraître aberrant ou au mieux obsolète. Alors qu’un art est censé s’affiner au fil des années, Disney verse dans un retour aux sources qui est un appel au minimalisme le plus infantile. Lorsque le studio a sortit la première version dans les années soixante-dix, cela apparaissait d’ailleurs comme le constat ultime de sa perte de vitesse. Le film de Wolfgang Reitherman vantait des valeurs basiques destinées aux enfants alors que quelques mois plus tard, Star Wars mettait en avant des thèmes tous aussi traditionnels mais de la manière la plus innovante qui soit. Allons nous donc décrypter le désintérêt que représente aux temps actuels cette monture next generation ? Certainement pas car il y a bien plus de choses savoureuses dans ce film que dans nombre de choses sorties dernièrement en salle.
On peut considérer qu’il existe deux formes de littérature pour les tous petits. D’un côté, il y aurait les livres fantaisistes élaborés de manière complexe. Ce sont les ouvrages qui, en s’ouvrant, déplient des décors en carton et permettent de petites interactions, comme ouvrir un segment de la page ou animer un élément amovible. De l’autre, il y a les livres dits classiques. Les pages sont illustrées par des dessins simplistes au-dessus desquels l’action est décrite par un paragraphe chiche et en gros caractère. Winnie l’Ourson appartiendrait à la seconde catégorie. Le mérite du film est de jouer intelligemment avec cette forme d’expression directement adressée aux gamins. La forme la plus évidente de cette expression tient bien sûr à une mise en scène qui appelle régulièrement à la mise en page littéraire. Les personnages s’échappent ainsi des dessins qui leurs sont attribués et se baladent au milieu des paragraphes décrivant leurs actions. La réalisation utilise de manière fort amusante ce principe et en sort une touche surréaliste non négligeable. De même, il prend plaisir à manipuler le personnage du narrateur qui assure sa fonction convenue de Dieu omniscient sur l’histoire mais également de personnage à part entière au travers ses multiples échanges avec le personnage titre. Tout ceci participe grandement à ce sentiment d’immersion au sein d’un livre animé.
Le script en reprend tous les principes d’ailleurs jusqu’à sa morale finale (pense aux autres avant toi-même et tu en seras récompensé). Le propos est certes dénué de toute fascination pour l’adulte pragmatique mais les évènements relatés dans Winnie l’Ourson appellent à des émotions clairement liées à notre enfance. Après tout, la traque d’une créature fantasmée dénommée poil long renvoie à nos terreurs purement infantiles où celles-ci découlent plus de nos propres actes que d’une réelle menace. Une même logique motive cette technique, que d’aucuns trouveront basiques, d’attribuer des caractéristiques extrêmement spécifiques à chaque protagoniste : l’obsession chez Winnie, l’intellect pour Maître Hibou, l’esprit manuel de Coco Lapin, la couardise de Porcinet, la mélancolie de bourriquet, l’esprit d’aventure de Tigrou. En fragmentant ces différentes émotions par protagoniste, le récit recherche la stimulation de l’imaginaire de sa jeune audience qui voudra ainsi retrouver un peu de ses propres émotions dans chacun des personnages. Le moyen est grossier mais il ne serait pas juste de critiquer le film parce qu’il se met au niveau de son public pour réussir à frapper son inconscient. Comme le dit Winnie, il ne peut comprendre les mots compliqués et son film est la preuve qu’il est possible de raconter de belles choses avec les termes les plus simples.
Winnie l’Ourson est un (pas très) long métrage attachant à suivre mais il peine cela dit à se targuer également d’une véritable poésie. L’aspect livre animé est mignon avec des dessins sans grands détails et refusant quasi-systématiquement l’utilisation des perspectives, mais ne véhicule pas une poésie très puissante en elle-même. On ne retrouve pas la même force que dans un Ponyo sur la Falaise, où là également le simplisme du trait traduisait une vision d’enfant. Si certains passages donnent envie de crier au génie (la séquence musicale dessinée à la craie ou le délire mielleux de Winnie), la fibre sentimentale n’est pas bien titillée au-delà de l’aspect nostalgique. Une limite à laquelle s’ajoutent quelques fausses notes (à quoi bon mettre une référence aux Aventuriers de l’Arche Perdue que les enfants ne comprendront probablement pas ?) mais qui ne doit pas empêcher de considérer l’œuvre comme une réussite totale par rapport à sa cible.