REALISATION : Jaume Balaguero
PRODUCTION : Filmax, The Jokers, Le Pacte
AVEC : Manuela Velasco, Paco Manzanedo, Hector Colomé, Ismael Fritschi, Emilio Buale, Mariano Venancio
SCENARIO : Jaume Balaguero, Manu Diez
PHOTOGRAPHIE : Pablo Rosso
MONTAGE : David Gallart
BANDE ORIGINALE : Arnau Bataller
ORIGINE : Espagne
GENRE : Horreur
DATE DE SORTIE : 12 novembre 2014
DUREE : 1h35
BANDE-ANNONCE
Synopsis : Quelques heures après les terribles événements qui ont ravagé le vieil immeuble de Barcelone, l’armée décide d’intervenir et envoie un groupe d’élite dans l’immeuble pour poser des détonateurs et mettre un terme à ce cauchemar. Mais quelques instants avant l’explosion, les soldats découvrent une ultime survivante : la journaliste Angela Vidal. Elle est amenée dans un quartier de haute-sécurité pour être mise en quarantaine et isolée du monde afin de subir une batterie de tests médicaux. Un endroit parfait pour la renaissance du Mal… L’Apocalypse peut commencer !
Jaume Balaguero l’avait annoncé : [REC] 4 allait être l’ultime épisode de la saga. Une saga qu’il aura su faire démarrer en grande trombe en compagnie de son comparse Paco Plaza, au travers d’un premier film sidérant de maîtrise qui reste encore aujourd’hui le haut du panier en matière de pure trouille depuis le passage à l’an 2000. Et comme souvent, quand un univers propre au grand écran tire sa révérence, c’est le moment idéal pour en dresser un bilan. On ne va pas se le cacher : celui-ci n’a rien de glorieux. En plus d’avoir vu tout son potentiel de réappropriation du first person shooting entièrement saboté au travers d’un [REC] 3 – Genesis de triste mémoire, on osera considérer que tout le problème de la saga [REC] aura finalement été d’avoir voulu élargir inutilement son univers au lieu de se limiter à un seul épisode. En effet, d’un film à l’autre, les deux réalisateurs n’ont jamais cessé de voir leur efficacité initiale fléchir de plus en plus, allant jusqu’à détourner l’épuisement de leur concept vers des voies pas toujours héroïques (en dépit d’un second film à la fois bourrin et astucieux). Le fait d’avoir voulu faire route séparée pour réaliser les deux derniers films ne fait qu’appuyer cette baisse de qualité, la complémentarité des deux réalisateurs n’étant plus qu’un vague souvenir. Du coup, après le mauvais résultat torché par Plaza (une préquelle WTF, aussi inutile que globalement hors-sujet), Balaguero incarne désormais la seule chance pour la saga de reprendre du poil de la bête en offrant enfin l’apocalypse rêvée depuis la fin du premier épisode. Et comme on pouvait le craindre, le sous-texte « apocalypse » frise le mensonge éhonté.
Pour faire simple, on se retrouve dans la même situation que face au récent Riddick de David Twohy : un univers éclatant aux yeux du monde à travers un premier film mémorable, amorçant la promesse d’une conclusion dévastatrice qui mouline de folles attentes chez les fans, et en fin de compte, rien de plus qu’une banale petite série B sanglante et relativement énervée, qui se contente tout juste de recoller les derniers morceaux de la saga. On ne sait pas trop si Balaguero s’était rendu compte un peu tard qu’il ne pouvait pas tirer son univers vers des horizons trop lointains, ou si un tel choix résidait d’un éventuel manque de budget (rappelons que le cinéma de genre espagnol va presque aussi mal que le nôtre), mais toujours est-il que l’intrigue a de quoi nous laisser sur notre faim. Revoilà donc la journaliste Angela Vidal (Manuela Velasco, toujours aussi mignonne en débardeur sali) enfin extraite du sombre immeuble de Barcelone où elle était bloquée durant une mise en quarantaine. L’immeuble étant détruit et le virus apparemment décimé, elle se retrouve de nouveau isolée, mais cette fois-ci sur un paquebot (baptisé Zarathustra… ne me demandez pas pourquoi) où une poignée de scientifiques étudie un échantillon du virus afin d’en tirer un éventuel vaccin. Ne me demandez pas ce qu’il va se passer, vous l’avez déjà deviné…
Grosso modo, le cadre est fixé dès le départ : ce décor de bateau aide certes à rassembler des personnages-clés de l’univers afin de former une symbiose idéale avec les trois précédents films, et ce en se concentrant sur l’envie d’éclairer les dernières questions que l’on se posait (à tout prendre, on aurait quand même préféré que le mystère reste entier). Mais hélas, il ne peut aussi qu’enfermer l’intrigue dans un cadre peu expansif, d’autant plus mal exploité qu’il ne reproduit jamais la tension claustro du premier [REC]. En cela, au-delà de commettre un certain nombre de gaffes narratives et de laisser peu à peu des stéréotypes s’agiter autour d’une héroïne plus énervée que jamais (un geek voyeur, des scientifiques bornés, des soldats aussi expressifs que des pneus, etc…), [REC] 4 se veut en fin de compte un banal rollercoaster d’horreur bisseuse, où tout le monde ouvre et referme des portes tout en courant sans trop s’arrêter dans des coursives mal éclairées, le tout supervisé par un Balaguero qui semble lui-même ne pas savoir quoi faire.
Du côté de la mise en scène, c’est le bordel : outre une narration limitée à bâtir un suspense mou du genou, les excès de shaky-cam font de vilains dégâts aux scènes d’action quand ce ne sont pas des mouvements de caméra assez débiles qui prennent le relais (exemple : comme on est en pleine mer, le cadre tangue parfois de gauche à droite…). Même l’idée de reprendre les scènes du premier [REC] sous un angle analytique tombe à plat, celles-ci n’étant au final que de simples extraits, ici revus par des personnages qui, étant au courant de l’origine du virus, se contentent alors de nous expliquer le pourquoi du comment. Inutile donc de s’attendre à une nouvelle remise à niveau des pratiques d’exploitation du found footage, cette pratique n’étant plus qu’un lointain souvenir. Ne reste alors, déjà pour sauver les meubles mais aussi pour faire oublier l’échec du précédent opus, qu’un montage sous Red Bull riche en poussées d’adrénaline (rien d’original, mais ça marche quand même), l’utilisation d’un moteur à hélice qui renvoie l’espace de quelques scènes au Braindead de Peter Jackson, et bien sûr, une actrice géniale dont le personnage d’Angela semble bien parti pour incarner une sorte de dérivé ibérique d’Ellen Ripley (la révélation finale de l’opus n°2 nous en donnait déjà l’impression). Assez efficace et sympatoche pour que l’on sorte de la projection sans avoir eu l’impression de perdre son temps. Reste que la déception prédomine : il est difficile d’admettre que l’électrochoc [REC] n’ait rien trouvé d’autre comme digne conclusion que ce petit survival sans originalité. Au moins, désormais, c’est bel et bien terminé…