REALISATION : James Gunn
PRODUCTION : Marvel Studios
AVEC : Chris Pratt, Zoe Saldana, Lee Pace, Dave Bautista, Benicio Del Toro…
SCENARIO : James Gunn, Nicole Perlman
PHOTOGRAPHIE : Ben Davis
MONTAGE : Fred Raskin, Hughes Winborne, Craig Wood
BANDE ORIGINALE : Tyler Bates
ORIGINE : Etats-Unis
GENRE : Science-fiction, Action
DATE DE SORTIE : 20 août 2014
DUREE : 2h11
BANDE-ANNONCE
Synopsis : Peter Quill est un aventurier traqué par tous les chasseurs de primes pour avoir volé un mystérieux globe convoité par le puissant Ronan, dont les agissements menacent l’univers tout entier. Lorsqu’il découvre le véritable pouvoir de ce globe et la menace qui pèse sur la galaxie, il conclut une alliance fragile avec quatre aliens disparates : Rocket, un raton laveur fin tireur, Groot, un humanoïde semblable à un arbre, l’énigmatique et mortelle Gamora, et Drax le Destructeur, qui ne rêve que de vengeance. En les ralliant à sa cause, il les convainc de livrer un ultime combat aussi désespéré soit-il pour sauver ce qui peut encore l’être…
Au sein de la phase II de l’univers cinématographique Marvel, Les Gardiens De La Galaxie était probablement le projet le plus intriguant. De cette période, il s’avère être le seul opus initiateur d’une nouvelle franchise. Tous les autres films n’étaient effectivement que des suites. Toutefois, c’est surtout par rapport à la certaine confidentialité du comic book d’origine que la curiosité est de mise. Certes, des personnages comme Iron Man ou Thor étaient eux-mêmes loin d’être aussi connus du grand public que des Spiderman ou Hulk. Mais ils demeuraient des icônes aisément identifiables. Ce qui n’est pas le cas des Gardiens De La Galaxie. Marvel Studios prendrait-il alors un risque à exploiter un tel objet de son catalogue ? Pas particulièrement. Le fait est qu’à l’instar d’un Iron Man en son temps, le projet se vend sur un concept apte à titiller l’attention du public. Difficile de refuser la proposition d’une aventure quelque part entre Star Wars et Les Douze Salopards. Les chiffres du box-office ont d’ailleurs parlé. Les Gardiens De La Galaxie a pulvérisé les records de fréquentation pour son premier week-end et a récolté deux fois son budget en deux semaines d’exploitation. Quant à savoir si l’invincibilité du studio est sans faille, il faudra probablement attendre le futur Ant-Man. Comme Les Gardiens De La Galaxie, le personnage est fort peu connu mais il a également la problématique de ne pas être attrayant au premier abord. Un homme en costume de fourmi capable de rétrécir, ça ne fait pas vraiment rêver. Plus que le long-métrage de James Gunn, il s’agit là du projet d’adaptation le plus incertain pour Marvel. C’est typiquement le genre d’entreprise qui doit assumer sa prise de risques afin justement de les amoindrir. Le désistement du talentueux Edgar Wright au profit du transparent Peyton Reed ne va guère dans ce sens. Mais pour l’heure, intéressons-nous aux Gardiens De La Galaxie et ses promesses à moitié tenues.
Outre le fait qu’il marque le début d’une nouvelle franchise, Les Gardiens De La Galaxie se distingue de ses contemporains en investissant de plein pied le versant galactique de l’univers Marvel. Jusqu’à présent, celui-ci est juste apparu comme un élément secondaire de certains films. Cette exploration en profondeur a ainsi le mérite d’injecter un peu de nouveauté au bien trop formaté multiverse. En s’éloignant de notre chère planète bleue, le film est bien obligé de créer de nouveaux mondes, et pour cela d’activer son imagination. Le script de James Gunn et Nicole Perlman a ainsi le bon sens de favoriser l’exotisme de l’aventure en multipliant les environnements (futuriste cité paradisiaque, prison intersidérale, planète en ruines, exploitation minière au sein d’une tête géante, lugubre navire). Le genre n’étant pas surreprésenté ces dernières années, le fan de space opera trouvera là moultes occasions de se rincer l’œil. Il est même surprenant de trouver dans ces visions quelque chose auquel on n’est plus forcément habitué : de l’émerveillement. En ce sens, le visuel des Gardiens De La Galaxie arrive souvent à intégrer son héritage du comic. Certaines compositions sont effectivement des splendeurs semblant tout droit sortir des planches dessinées. Même la 3D est dans ces moments parfaite en renforçant intelligemment les perspectives. Il est régulièrement frustrant de voir que les sublimes recherches artistiques sur les productions Marvel ne se concrétisent guère à l’écran. Les Gardiens De La Galaxie a lui habilement réussi la transition.
Joie, bonheur, félicité en somme ? Esthétiquement au moins. Il suffit de gratter un peu pour voir qu’il grouille de sacrées bestioles derrière l’exaltation première. En fait, rien qu’au niveau de la réalisation, on pourra poser des bémols. Aussi inspirée soit-elle par moments, la mise en scène de Gunn se réfugie généralement derrière un découpage purement fonctionnel et anonyme. Ça se ressent tout particulièrement au niveau des scènes d’action qui auront toutefois la chance de bénéficier de formidables money shots conçus par l’équipe des effets spéciaux. Néanmoins, c’est plus particulièrement sur le plan narratif que les griefs se multiplient. Sur le papier, Les Gardiens De La Galaxie concrétise l’attente d’un mix entre le classique de George Lucas et celui de Robert Aldrich. On retrouve bien une bande de hors-la-loi et de laissés-pour-compte hauts en couleurs qui, par les circonstances, se lancent dans une aventure faisant d’eux les sauveurs de la galaxie. Le constat est donc rempli… avec plein de ratures et de taches d’encre mais il est rempli.
Grossièrement, le défaut majeur du long-métrage découle de l’une de ses qualités. L’aventure veut nous faire voyager et être la plus riche possible. Le rythme ne se permet alors guère de temps morts, ce qui ne laisse peu de place pour poser développements et personnages. En soit, on pourra remercier Gunn d’éviter les pires écueils de l’origin story. Il nous épargne de dresser un catalogue détaillé du passif de chaque personnage avant de les lâcher dans l’action. Ce choix pertinent n’est pas pour autant une preuve de la maîtrise de l’écriture. S’obligeant perpétuellement à amener le plus rapidement possible l’histoire là où il veut, le scénario recours aves zèle à des artifices aussi faciles qu’expéditifs. Par exemple, après une dizaine de minutes de présence à l’écran, Gamora balance qu’elle a trahi ses méchants commanditaires. Voilà qui est fort commode pour lui permettre de rejoindre le groupe en formation. Le film regorge de ces instants charniers à la mécanique bâclée. Il ne s’agit plus de faire avancer l’histoire avec fluidité et imprévisibilité mais d’enchaîner les séquences à la vitesse maximale. Du coup, ces passages forcés sombrent dans le ridicule tellement ils tombent comme un cheveu sur la soupe. Le rebondissement le plus représentatif intervient lors de la visite chez le collectionneur. Afin de démontrer aux gardiens le pouvoir néfaste de l’objet convoyé, le récit choisit de passer par un personnage apparu trente secondes auparavant dont les motivations sont extrêmement vagues. Gunn pensait probablement que le rythme soutenu et le charisme de ses personnages détournerait l’attention sur ces points. Sauf que la suspension d’incrédulité a ses limites.
Et bien sûr, comment ne pas évoquer la sempiternelle problématique de l’humour dans les productions Marvel ? Après des films comme Horribilis ou Super, il aurait été raisonnable de penser que Gunn saurait dosé le premier et le second degré. Les Gardiens De La Galaxie ne trouve malheureusement pas le point d’équilibre, usant de sa comédie à des moments jamais appropriés. Si le face-à-face entre Hulk et Loki dans Avengers vous a donné de l’urticaire, le combat final des Gardiens De La Galaxie vous filera une crise cardiaque. L’affrontement passe par une idée aussi bête qu’éculée. En soit, l’idée aurait bien pu avoir sa place dans le film si elle avait été utilisée pour une scène adaptée. Par exemple, il n’y aurait eu guère de mal à l’employer face aux prisonniers abrutis du pénitencier spatial. Il n’en va pas de même lorsqu’elle est appliquée envers le grand méchant de l’histoire. Aussi classe et menaçant a-t-il pu paraître, il a été décidé en conclusion de se moquer de lui et de le traiter comme un clown imbécile par un héros qui ne vaut guère mieux. Une façon peu respectable de signifier en guise de point final que tout ce que l’on a vu n’a finalement guère d’autre importance puisque c’est rigolol.
Enthousiasmant par moments et refroidissant par d’autres, Les Gardiens De La Galaxie est loin d’avoir su briser le moule Marvel. Son seul visuel arrive à en faire cependant une de leurs productions les plus appréciables.